L’obélisque de la bataille légendaire de Morat (Murten)

Extrait traduit du livre :

Historische Denkmäler in der Schweiz. 34 helvetische Erinnerungsstätten, kritisch betrachtet (2021)

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Deutscher Text:

Das Denkmal für die legendäre
Schlacht bei Murten

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L'obélisque de Morat

Photo : auteur, 6.7.2013

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 Sobriété classique et monumentale

Les batailles légendaires de Morat « 1476 » et Laupen « 1339 » sont des récits identiques. Voir : Les parallèles entre la guerre de Laupen et la guerre de Morat.

La bataille de Morat s’insère dans les guerres de Bourgogne (voir l’analyse de l’auteur dans le livre : Les vieux Confédérés (2019).

La guerre de Charles le Téméraire contre les Confédérés helvétiques est une copie conforme de la campagne militaire d’Alexandre le Grand contre le royaume des Perses.

Ce dernier a assiégé la ville de TYR (TYRUM, Tyrus = TRM) pendant SEPT mois.

Le premier a assiégé la ville de MORAT (MRT > TRM) pendant SEPT jours.

Les chroniques anciennes étaient de bonne foi : elles disaient que Charles le Téméraire au Moyen Âge ressemble beaucoup à Alexandre le Grand de l’Antiquité.

Les guerres de Bourgogne sont présentées comme une guerre de Trente ans : le conflit a débuté en « 1447 » avec un assaut sur Fribourg ( !) et a fini avec la mort de Charles le Téméraire en « 1477 » après la bataille de Nancy.

Un détail : la déclaration de guerre à la ville de Fribourg s’est conservée. Elle contient 28 noms, parmi eux la signature d’Alexandre le Grand ( !).

Depuis longtemps les historiens savent ou devraient savoir que les guerres de Bourgogne sont suspectes. Mais comme toujours : les doutes sont supprimés et les absurdités mises de côté.

Un exemple: l’armée bourguignonne devant la petite ville de Morat comptait 100'000 hommes. Les Bernois et les Confédérés auraient tué ce jour-là, jour des Dix Mille Martyrs (22 juin), 30'000 ennemis dans l’espace de douze heures !

Et à propos du fameux butin des Bourguignons : quelle armée transporterait son trésor d’état, tapisseries, argenterie, orfèvrerie et diamants en première ligne ?

Le trésor ou butin des Bourguignons existe. Ce sont les Confédérés qui l’ont collectionné et payé par leur propres moyens.

La bataille légendaire de Morat est bien vivante dans la mémoire populaire. Chaque année un cortège se déroule dans cette petite ville, la solennité, suivi d’un tir de campagne.

Lors de l’exposition nationale en 2002 on a implanté dans le lac de Morat près de Montilier (Muntelier) un cube avec à l’intérieur un panorama de mauvais goût de la bataille, peint par un artiste peu connu de la fin du 19ème siècle.

Au 18ème siècle déjà existait près de la petite commune de Meyriez (Merlach), sur la route de Faoug (Pfauen) une chapelle avec un ossuaire à la commémoration de la bataille. Cet édifice a été détruit en 1798 par les troupes françaises.

A l’emplacement de l’ancien ossuaire le canton de Fribourg a fait ériger en 1822 le monument actuel.

L’obélisque commémoratif de Morat ou Meyriez d'une hauteur de 18 mètres est construit de blocs : ce n’est donc pas un monolithe. Il est entouré d’arbres et de haies et se trouve aujourd’hui encastré entre une ligne ferroviaire et la route de contournement de Morat.

Au-dessus de la base, vers le sud-ouest, donc orienté vers Fribourg, on lit en lettres dorées l’inscription lapidaire :

Victoriam XXII Jun[ii] MCCCCLXXVI patrum concordia partam novo signat lapide respublica Friburg[ensis] MDCCCCXXII.

traduction libre :

La république de Fribourg a honoré ici la victoire remportée le 22 juin 1476 par l’unité des ancêtres avec une nouvelle pierre.

L’auteur s’étonne: quel motif a poussé le jeune canton de Fribourg sept ans après l’époque napoléonienne à ériger un tel monument ?

Le gouvernement fribourgeois avait déjà projeté en 1817 l'idée d’un monument commémoratif à Morat. Le crédit initial avait été triplé, bien qu’à cette époque on était dans une dépression économique.

De plus Fribourg a réalisé cet obélisque sans la participation de Berne ou d’autres cantons.

Mais le canton avait un intérêt particulier.

La région de Morat était avant 1798 un baillage commun à Berne et Fribourg : tous les quatre ans le district était gouverné par un bailli alternativement fribourgeois ou bernois.

En 1803 Morat fut attribué au nouveau canton de Fribourg, bien que la région fut protestante, de langue allemande et orientée vers Berne. 

Il y avait donc une raison politique manifeste derrière cette entreprise : le canton de Fribourg voulait avec ce monument démontrer sa légitime possession de Morat et remporter la bataille.

Le canton a initié une autre légende : on dit qu’un coureur a annoncé la victoire de Morat à la ville de Fribourg, mourant aussitôt après avoir délivré le message.

On devine derrière cette histoire l’exemple antique du coureur de Marathon.

L’allusion est déjà dans les noms : MORAT (MRT et MARATHON (MRT). La suite des consonnes dévoile aussi la MORT (MRT).

On ne peut chasser les Bourguignons de Morat. Parfois le lac prend une couleur rougeâtre, due à une massive prolifération de certaines algues. Les Moratois parlent du sang des Bourguignons.

Pour l’auteur l’obélisque de Meyriez exerce une certaine fascination.

Ce n’est pas la mémoire d’une bataille légendaire, mais la sobriété classique de ce monument qui provoque ce sentiment. On peut apprécier le lieu sans penser à l’histoire.

On pourrait dire que cet obélisque a un rapport avec autre chose ou est-ce simplement un exemple d’art pour l’art ?

L’inscription du monument pourrait aussi être remplacée par ET IN ARCADIA EGO (Et moi aussi j’ai vécu en Arcadie.).

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1.2019